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Le scoop était presque parfait

Attroupement et circulation arrêtée sur la Ring Road ce vendredi 15 novembre. On a signalé la présence d’une bombe artisanale. Plus de bruit que de mal.

C’est une matinée qui commence comme toutes les autres depuis mon arrivée au Népal. La veille, des dizaines de personnes défilaient dans les rues de Katmandou à l’occasion de la Journée Mondiale du Diabète. Ce 15 novembre, il y en a autant qui brandissent des drapeaux avec le marteau et la faucille (impossible de savoir de quelle branche communiste il s’agit). Ils et elles manifestent pacifiquement, criant des slogans et interrompant la circulation à la jonction de Tripura Marg, Thapathali Road et Kupondole Road – la sortie de la capitale, en direction de Lalitpur. Le cortège avance vers le quartier de Tripureshwor. Les véhicules peuvent redémarrer.

15 novembre 2013 - manifestation de militants communistes circulation à la jonction de Tripura Marg, Thapathali Road et Kupondole Road (Crédit : SH)
15 novembre 2013 – manifestation de militants communistes interrompant la circulation à la jonction de Tripura Marg, Thapathali Road et Kupondole Road, entre Katmandou et Lalitpur (Crédit : SH)

Quelques minutes plus tard, c’est la Ring Road qui est bloquée au niveau de la Naya Bato à Lalitpur. Vraiment bloquée cette fois. Plusieurs motocyclettes et voitures sont garées en désordre et deux rangées de personnes – une au nord, une au sud – laissent cette route vide sur environ 300 mètres.

15 novembre - plusieurs dizaines de personnes observent l'opération de désamorçage sur la Ring Road (Crédit : SH)
15 novembre – plusieurs dizaines de personnes observent l’opération de désamorçage à Lalitpur sur la Ring Road (Crédit : SH)

On me dit qu’une « socket bomb » est en train d’être désamorcée. Socket ? Là, mon traducteur intégré a du mal. La personne qui m’a donné l’info sourit et traduit en népali. Malgré les quelques surnoms tendancieux qui m’ont été donnés pendant mes études universitaires à cause de ma pilosité faciale, je ne connais rien en explosif. Ni en français, ni en anglais et encore moins en népali.
Au sud de la route, environ 200 personnes observent. Le chauffeur d’un bus marqué « Tourist » fait demi-tour alors que ses passagers prennent des photos de l’opération.

Ça y est, j’ai un scoop. Je me vois déjà en train de faire un direct pour la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC), être publié par Le Matinal. Mon H2 enregistre, je prends des photos et je pose des questions. Mais les policiers ne sont pas bavards. Quand j’essaie de lire son grade et son nom inscrits sur sa chemise, l’un d’eux pivote un peu pour cacher son badge. Il me donne son prénom : Kumar. Il répond à chacune de mes questions en commençant par « OK ».
La police aurait reçu un appel à 9h50 pour signaler la présence d’un objet non-identifié sur la route. Une première a été désamorcée plus tôt et ils sont en train de s’occuper de la seconde. Mais il me rassure : c’est une petite bombe artisanale.
On est interrompu. Deux agents de l’Armed Police Force (APF), treillis, casques, mitraillette sous le bras et sifflet à la bouche font signe de reculer. Et dix secondes plus tard, boom.

Même si elle surprend, ce n’est pas une grosse détonation. D’ailleurs, je ne sens, ni ne vois aucune émotion chez les badauds. La plupart reste immobile et quelques-uns retournent à leur véhicule. « O-Kaaaayy ». Je commence ma réflexion comme Kumar, une nonchalante incertitude en plus. Justement, Kumar qui est toujours près de moi m’affirme que c’était une « explosion sûre et contrôlée ».

Les agents de l'Armed Police Force après avoir désamorcé la "socket bomb"
Les agents de l’Armed Police Force (APF) après avoir désamorcé la « socket bomb » de Lalitpur sur la Ring Road le 15 novembre 2013 (Crédit : SH)

L’équipe de désamorçage reste encore quelques minutes là où l’objet non-identifié a explosé. Lorsque les trois agents reviennent à leur voiture, leurs collègues font signe que la route est rouverte. Pas d’applaudissement, pas même un soupir de soulagement dans l’assistance, la circulation sur la Ring Road reprend immédiatement comme un jour normal (alors que le bandh sur les transports est toujours d’actualité).

Après la tension de l'opération de l'APF, une minuscule petite minute aura suffit pour que la circulation reprenne normalement sur la Ring Road (crédit : SH)
Après la tension de l’opération de l’APF, une minuscule petite minute aura suffit pour que la circulation anarchique reprenne normalement sur la Ring Road (crédit : SH)

Je croyais avoir une information brûlante, mais ce genre de petit incident a déjà eu lieu ces derniers jours. Et il paraît que les opposants aux prochaines élections continueront de manifester leur désaccord avant le scrutin.
Finalement, je préfère que ce soit un incident « contrôlé » qu’un scoop éclatant. Oui, mais qui ça intéresse de savoir qu’une bombe artisanale a été désamorcée au Népal ?

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fanuet

Commentaires

Roseline Huet
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Nous voilà plongés dans le "direct". Comme toujours, j'avais l'impression d'être dans les rues de Katmandou, Tripura Marg, Kupondole, Thapathali... et d'attendre que la bombe soit désamorcée ! Moi, j'ai poussé un ouf de soulagement, contrairement aux badauds ! ça se comprend, n'est ce pas ?
Les journées à venir s'annoncent animées.
J'attends la suite, Stef.

Stéphane Huët
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Oui, ça se comprend !
Malheureusement, je risque ne pas être témoin de la suite. Il est fortement recommandé de ne pas sortir le mardi 19 novembre 2013 (jour du scrutin), et même lundi et mercredi qui ont été déclarés fériés.

Marc
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Est-ce que ces "bombinettes" ne relèveraient pas d'une sorte de tradition folklorique, un peu comme les feux d'artifice et les pétards de la Chine frontalière en période de fêtes? :-))