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Reste plus qu’à le faire

Comment des conversations brumeuses sur le monde qui change ont donné naissance au “meilleur court métrage mauricien indépendant sur le confinement de tous les temps”.

Il y a une dizaine de débuts de billets de blog qui attendent d’être complétés sur mon Google Drive. Une trentaine d’idées d’articles se bousculent dans ma tête depuis plus d’un an — certaines ont tué d’autres, quelques-unes espèrent toujours prendre vie et je sais que pour la moitié d’entre elles, ça ne pourra jamais marcher.

Depuis plus d’un an, donc, je végète. On dirait que certains l’avaient remarqué. Car à peine le Premier ministre mauricien avait annoncé le confinement lié à la COVID-19 à partir du 20 mars que je recevais un message pour m’inviter à “reprendre Mondoblog”. C’est vrai que ce temps à la maison semblait propice à faire des trucs pour soi (ou pour envoyer à ses amis via WhatsApp), lire ou regarder des classiques, écrire, retourner à l’essentiel, penser au monde qui change pour tenter de changer soi-même et d’autres niaiseries new age. Mais si je n’écris ni ne bidouille plus de sons depuis des mois, ce n’est pas par manque de temps à la maison. C’est que je me complais avec allégresse dans la paresse.

Le fait d’être confiné chez moi pendant une période indéterminée n’allait rien changer. Franchement, qu’aurais-je pu écrire de plus ou de mieux que ce qu’on trouvait dans ce déluge de “Journaux du confinement” sur la Toile ? Mon inactivité scriptique me semblait indiscutable quand j’ai rejoint mon ami Mathieu chez qui j’ai passé une bonne partie du confinement. Ben ouais, je me voyais bien profiter de nos soirées à regarder des films, écouter ou jouer de la musique et refaire le monde qui change autour de quelques bières, tout ça sans céder à l’injonction à la créativité. Pourtant, c’est précisément lors d’un de ces errements dans nos doutes et nos passions à se demander quelle sera la “nouvelle normalité” que Mathieu a proposé : “hey, on pourrait faire un film de tout ça !”

Comme les sujets d’articles dans ma tête, lui et moi avions déjà évoqué des projets à faire ensemble. Mais le manque de créativité, les excuses foireuses et la paresse (encore elle) ont mis des obstacles sur mes réflexions. Mais cette fois, on était bloqués ensemble. Plus d’échappatoire possible : on allait faire un truc tous les deux. On s’est encore plus motivés en décidant de proposer notre expérience au concours FIM KONFI, lancé par l’association Porteurs d’Images qui organise le Festival de court métrage de l’île Maurice depuis 2007.

Tournage du court métrage ‘Reste plus qu'à le faire’

Une semaine plus tard — la paresse avait laissé sa place à la procrastination — on s’est assis pour écrire un scénario. La trame était posée en une soirée et les dialogues se sont développés sur trois jours. Avec cette première étape, on savait exactement comment on voulait que cet essai soit représenté à l’écran. Je croyais qu’on pouvait filmer. Mais il fallait encore qu’on trouve la bonne lumière, la bonne énergie, la bonne technique, le bon matériel, le bon geste, le bon dessin, la bonne position, la bonne synchronisation, la bonne intonation. On voulait s’amuser et on l’a fait avec sérieux. On a ensuite laissé le montage entre les mains expertes de Robin des Fataks.

On a balancé Reste plus qu’à le faire sur Internet le 31 mai, le premier jour du déconfinement à l’île Maurice et un mois après la date limite de FIM KONFI. De toute façon, on savait bien que notre court métrage serait inéligible : il dure plus des trois minutes autorisées et surtout, Mathieu et moi, faisions partie du jury. Le concours n’était qu’un beau prétexte pour se lancer.

Montage du court métrage ‘Reste plus qu'à le faire’

Pour une première, même s’il y a beaucoup de choses à améliorer, on est contents du résultat. Alors, dans une opération de communication douteuse, on a, nous-mêmes, décrit le film comme “le meilleur court métrage mauricien indépendant sur le confinement de tous les temps”. Et ouais, une catégorie dessinée pour et par nous. On fera mieux la prochaine fois.

Ça fait une semaine que le confinement est levé à l’île Maurice. Les voitures encombrent déjà les routes, des centaines de consommateurs ont envahi les magasins dès le premier jour du déconfinement, c’est la folie dans les bureaux et presque tout est revenu à sa place. C’est le retour à l’ancienne normalité. La seule chose qui a changé pour moi, c’est que Mathieu et moi allons maintenant faire les cons avec une caméra et un magnétophone.

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Auteur·e

fanuet

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