Stéphane Huët

Ivato : aéropause

587 040 km² et rien à jeter. Madagascar se contemple de long (1 570 km) en large (575 km). Il faut voyager pour découvrir tous les recoins de ce pays bouleversant. Pour cela, il y a le mythique taxi-brousse. Et il y a l’avion qui peut être aussi folklorique qu’un trajet sur terre. Plus que le voyage même, c’est l’attente allongée par les retards (récurrents) de la compagnie aérienne nationale qui est une vraie expérience.

Aéroport d'Ivato, Antananarivo, Madagascar
Aéroport d’Ivato (auteur : Jialiang Gao)

Fin de vacances. C’est toujours morose de se préparer à rentrer à la maison. Pendant 13 jours, j’ai découvert des sourires, des couleurs, des ambiances et des paysages très différents de Nosy Be où j’habite. Je suis encore émerveillé et je ne suis pas pressé de reprendre le travail. Apparemment, Air Madagascar est avec moi : 2 jours avant le départ prévu, j’avais reçu un SMS pour me prévenir que l’avion aurait 3 heures de retard.

Quand j’arrive à Ivato, l’aéroport de Tana, je comprends que plusieurs voyageurs – ceux qui ont le visage marqué par la fatigue et l’énervement – n’ont pas reçu le SMS. J’enregistre mes bagages. Embarquement prévu à 18h20. J’achète une édition du Nouvel Observateur vieille de 2 semaines pour passer le temps. À Ivato, des marchands vendent des magazines portant la mention « Interdit à la vente » qu’ils ont récupérés des avions des vols internationaux.

18h15. Une voix féminine jaillit des haut-parleurs. Je n’ai rien compris, mais je me précipite vers la salle d’embarquement. Raté. C’est l’embarquement des passagers pour Majunga. Ou Tamatave. Je ne sais plus. Les passagers pour Nosy Be se rasseyent en poussant de longs soupirs. 2 adolescents, casquettes mal enfoncées, jeans trop larges, s’approchent du comptoir. L’allure gangsta, mais le ton poli – je reconnais leur accent réunionnais – ils demandent les raisons du retard et l’heure du départ. La réponse est évasive et n’excuse, ni n’explique le retard.

Dans la salle, les enfants ne tiennent plus en place, leurs parents essaient de les retenir, un sosie de Paul Kagamé a l’air vraiment énervé et on reconnaît les fumeurs qui musclent leurs mâchoires dans du chewing-gum. « Tou vé un tchiowing gôm », me propose une Italienne. Non merci, je ne fume pas.

Des Anglais devant moi ouvrent des canettes de THB. Je pense alors à une bière pour passer le temps. Mais je n’en ai pas vraiment besoin ; pas comme celles qu’on ouvre après une dure journée de travail. Je jette un coup d’œil au bar au fond de la salle d’attente. Les jeunes Réunionnais déguisés en gangstas tiennent leurs bouteilles de Coca-Cola comme Kanye West tenait sa Hennessy au MTV Awards 2009. Ce qui me dissuade totalement de me déplacer pour cette bière.

Kanye West, MTV Awards 2009
Kanye West et son cognac Hennessy au MTV Awards 2009

Je replonge la tête dans mon magazine. 2 heures plus tard, l’avion n’est toujours pas arrivé. Les enfants courent dans tous les sens. Leurs parents n’en peuvent plus. Résignés, ils observent leurs progénitures et s’échangent un regard de compassion.Le sosie de Paul Kagamé ouvre les yeux en grand et j’ai l’impression qu’il s’apprête à pousser un cri de guerre. Il me fait peur. Dans les toilettes, des messieurs costauds à l’accent slave s’autorisent une petite cigarette en fredonnant Sweet Home Alabama. Je me demande s’ils ont un sens de l’humour très développé ou s’ils sont inconscients (certains membres de Lynyrd Skynyrd ont été tués dans un accident d’avion le 20 octobre 1977). Ambiance bizarre.

L’avion arrive enfin à 20h50. La salle d’attente applaudit. Alors que je pense que le plus dur est fait, c’est maintenant que la tension monte.

Sur le tarmac, un homme s’énerve sur son épouse parce qu’elle n’avait pas anticipé son bond du siège dès la première syllabe de l’appel de l’hôtesse. En haut de la passerelle, je suis bloqué à l’entrée de l’avion car la file n’avance plus. Je patiente mais derrière, l’Italienne en manque de nicotine me bouscule. Enfin dans l’appareil, le premier steward regarde ma carte d’embarquement et me dit « 5E » sans indiquer une direction précise. Merci, je sais lire.

J’aurai pour voisins les 2 Réunionnais gangstas. Une dame arrive vers eux en montrant son numéro de siège. L’un d’eux est à sa place. Le plus grand réagit : « Hey, madame, tu peux pas aller derrière s’il te plaît ? » Le ton est sincèrement poli, mais la fatigue de l’attente lui fait oublier de mettre les formes. Elle ne peut pas. Elle doit être à sa place pour s’asseoir derrière sa maman qui est trop vieille pour voyager seule. Il est difficile d’attendrir un gangsta : « oui, mais moi aussi je veux être à côté de mon frère ». OK, je n’ai ni maman, ni frère dans l’avion. Je cède ma place pour en finir. Les 2 clans me disent merci en arborant des sourires qui m’apaisent.

Je prends la première place libre et un autre steward me gronde gentiment en précisant que c’est sa place. Exténué, je lui explique en onomatopée la situation. Il me conduit à la place initiale du grand frère gangsta – siège côté hublot – où est assis un garçon de 2 ans. Son papa qui est sur le siège côté couloir l’installe sur le siège du milieu pour que je puisse gagner ma place. L’enfant voulait admirer les lumières des maisons tananariviennes du ciel. Il pleure. Lorsqu’il se calme, une hôtesse se penche vers lui et demande « est-ce que ça va ? » sur un ton enfantin. Il fait de grands mouvements de gauche à droite avec sa tête pour dire non. Et il recommence à pleurer.

Parti déjà dans des conditions particulières, ça se confirme : le trajet va être compliqué.

C’est vrai que c’est beau Antananarivo la nuit (auteur : Souvaroff).

L’avion avance sur la piste de décollage. Je ferme un peu les yeux (oui, je ne suis pas très à l’aise en avion). Ça y est. C’est maintenant que j’ai vraiment besoin de cette bière. Quand l’hôtesse arrive avec son chariot, je hurle « une bière s’il vous plaît ! » avant qu’elle me propose quoique ce soit. « Désolé monsieur, il n’y a pas d’alcool sur les vols domestiques ».

La prochaine fois je prendrai le taxi-brousse.


Mon rendez-vous manqué avec Guénolé

Colline des rumeurs, haut lieu de la nuit malgache où la bière coule à flots… Autant de descriptifs aussi mystérieux qu’aguicheurs sur Tuléar que je me devais d’y aller faire un tour. Et pourquoi pas en profiter pour rencontrer le mondoblogueur qui en parle le mieux ?

RN7 : 950 km entre Tana et Tuléar

Épuisés par 950 km de route. Éreintés par la chaleur (38°c). Et soulagés d’avoir terminé ce périple de 10 jours. C’est dans un état vaseux que nous posons les pieds à Tuléar à l’heure du déjeuner. Dans le premier restaurant qui s’offre à nous, je commande une bière et je jette un coup d’œil à mon téléphone.

Ça fait 3 heures que j’ai envoyé un message via Facebook à Guénolé pour lui confirmer mon arrivée dans sa ville – « Je serai à Tuléar aujourd’hui [mercredi] jusqu’à 16h avant de partir pour Mangily. Je reviens samedi et j’y passe toute la journée ». Pas de réponse. Il doit être en cours.
Pour moi qui suis nouveau dans la communauté Mondoblog, c’est un peu un modèle que je vais rencontrer. C’est après l’avoir entendu parler de son blog dans TIC : une révolution planétaire, Madagascar dans un monde qui change, une émission de l’Atelier des médias diffusée le 1er octobre 2011, que je suis allé découvrir la plateforme de blogueurs de RFI. C’est après avoir lu ses billets que j’ai eu envie d’en écrire.
Imaginez donc mon impatience devant mon téléphone. C’est un peu comme si Paul Scholes devait rencontrer Bryan Robson ; Alain Ramanisum qui va serrer la main de Serge Lebrasse.

La peau du ventre bien tendue, nous errons dans la rue où se trouvent les boutiques d’artisanat. « Entre, juste pour voir monsieur ! » me disent les vendeuses. Il fait très chaud et l’artisanat tuléarois défile devant moi sans que j’y porte beaucoup d’attention. Encore un coup d’œil à mon téléphone. Toujours rien.

16h. En route pour Mangily, un village à 27km au nord de Tuléar. 1h de piste. Épouvantable.
Mais à destination, le sable est fin, la nuit est belle et il n’y a pas de réseau. Ça doit être ça le paradis. Après quelques contorsions je trouve l’endroit où l’on peut avoir 2 barres. Suffisantes pour recevoir un message de Guénolé. Il aurait préféré qu’on se voie aujourd’hui parce qu’il sera à Madiorano samedi et n’est pas sûr de revenir avant mon départ.
Je suis déjà à Mangily. Je n’ai pas le courage de faire une deuxième heure de piste pour aller à Tuléar et devoir en faire une troisième après une soirée, potentiellement, festive. J’attendrai samedi.

2 pêcheurs Vezo sur leur pirogue

On profite de la plage de Mangily. Je contemple le savoir-faire des Vezo le temps d’une promenade en pirogue à voile. Et j’apprécie le pittoresque trajet en charrette à zébus pour aller visiter la forêt des baobabs.

Charrette à zébus allant à la forêt des baobabs

Enfin samedi. De retour dans la ville pour l’après-midi avant le départ définitif du sud. Après un dernier tour aux boutiques d’artisanat, un peu de repos s’impose en attendant des nouvelles de Guénolé.
L’heure de mon départ approche et je préfère lui donner rendez-vous pour plus tard à Nosy Be. Nous ne nous verrons malheureusement pas cette fois. Comme pour ne pas risquer de briser un mythe.

 


Le test de Diego-Suarez

Affiche du marathon de Diego-Suarez 2012, Madagascar
Affiche du marathon de Diego-Suarez 2012

6 mois que je l’avais dans le collimateur. Ce parcours de 22,5km longeant la deuxième plus grande baie du monde.

Tout part d’une conversation avec mon ami Pierre qui habite à Diego-Suarez. Je lui racontais la course de 3,5km organisée par l’entreprise où je travaille. Courte, mais mes collègues (adversaires d’un jour) étaient trop rapides. Comme si ça ne lui suffisait pas de savoir que je pouvais souffrir sur 3,5km, il m’a dit « Ah, tu cours ? Ça  te dirait de participer au Marathon de Diego-Suarez ? » J’ai répondu par l’affirmative avec entrain, prêt à me fixer un objectif pour régulariser mes joggings qui tombaient tous les 36 du mois.
« Bon, ça sera le semi pour commencer, pour voir de quoi on est capable »
. On était d’accord. Rendez-vous était pris pour le dimanche 30 septembre 2012.

Depuis cette conversation qui avait eu lieu le dimanche 1er avril 2012 (ça aurait pu être une bonne blague), j’ai passé les 3 mois suivants à me dire « bon, à partir de lundi prochain je reprends le jogging sérieusement » et « à partir de ce week-end, je réduis la consommation d’alcool ». Toute tentative a été un échec. Jusqu’à la mi-juillet. Par orgueil, j’ai fait un programme de préparation stricte : régime sec, alimentation saine et 4 courses hebdomadaires.
Pendant ce temps, Pierre se préparait aussi.

J’arrive à Diego-Suarez le vendredi 28. Le varatraza[1] souffle fort et j’appréhende la course de dimanche. Le soir, je reçois un coup de fil du paternel (bon coureur de trail) qui me donne les derniers conseils pour que je sois dans les meilleures conditions pour la course.

Samedi 29, Pierre m’appelle pour m’annoncer qu’il ne sera pas sur la ligne de départ, bloqué à Tana à cause d’une désorganisation dans les plans de vols.
La course ne sera pas la même, mais je vais aller au bout de l’objectif.
Dîner (un bon gros plat de pâtes) à 18h30. Derniers coups de fil de ma maman et ma femme qui apportent, elles, un soutien moral indispensable. Au lit à 20h.
Dimanche 30. Réveil à 3h50. Comme les vrais sportifs, je prends un bon petit-déjeuner 3 heures avant le départ. Tout ça est tellement nouveau pour moi.

Il est 5h50. En remontant la rue Colbert, je croise les fêtards qui sortent d’une boîte de nuit. L’ivresse. Ça fait longtemps que je n’y ai pas goûté.
À la Place de l’Hôtel de Ville avant le départ, les athlètes – dossard bleu pour les semi-marathoniens, dossard rouge pour les marathoniens – s’échauffent. En observant l’allure, les mollets et même les habits de certains, je sens que la course va être difficile.
Contrôle des dossards, dernières recommandations. À 6h30 c’est parti. Les coureurs détalent. Je me souviens des 3,5km parcourus au rythme effréné du salegy qui m’avaient assommé. Je vais à mon rythme.
Je trouve un compagnon de course qui a une bonne allure. On fait connaissance. Tsivo. Stéphane. Enchantés. Tsivo connaît le parcours pour avoir fait le semi l’an dernier. Il me prévient avant chaque difficulté. On s’entend bien. Pause pipi ou nouage de lacets, on s’attend.
Après 8km en sa compagnie, je nous vois déjà passer la ligne d’arrivée ensemble pour une belle photo – tellement cliché ! Mais à la 3e côte, Tsivo me dit de continuer tout seul. Je l’encourage, mais il ne peut plus tenir le rythme. Psychologiquement, ça me met un coup : j’ai mal au genou, à la cheville, j’ai un point de côté, j’ai chaud. Jusqu’à ce que je voie 2 coureurs devant qui semblent aller à mon rythme. Motivation. Je les rejoins. Lorsque j’arrive à leur niveau, l’un d’eux accélère (il finira 3e du semi-marathon). Il nous fait signe de tenir son rythme, mais il va trop vite. Nouvelle pente et mon nouveau compagnon de course ne peut plus suivre.
Me revoilà obligé de faire l’effort seul.

Sur la descente pentue au niveau du Meva Plage Hotel (je pense aux marathoniens qui la remonteront pour regagner la Place de l’Hôtel de Ville), j’aperçois devant moi Fredo qui galère. J’accélère pour le rattraper. On se relaie et ça marche. Il me montre « ça c’est la dernière montée ». Elle est impressionnante. On s’en sort bien. Il reste moins de 2km et c’est maintenant qu’il faut donner un petit coup d’accélération. J’essaie de tirer Fredo avec moi : « alo tsika ! »[2] Mais il n’arrive pas à suivre. Il reste un peu plus d’un kilomètre et je vois un énième coureur devant moi. Dernier effort. Je le dépasse avant le dernier virage qui mène sur la plage de Ramena, l’arrivée. Un spectateur qui crie « kouraz vazaha » me donne un sourire lorsque je passe la ligne d’arrivée.
Je regarde ma montre. 1h53m44s.

Publicités pour un magasin d’articles de sport français et un équipementier allemand

À peine le temps de réaliser ce que je viens d’accomplir, on me prend par le bras et on me guide sous un chapiteau. Sans me parler, une hôtesse enlève mon dossard, une autre me remet un t-shirt et la médaille « Finisher ». On m’indique le dernier point de ravitaillement. Pas de bisou comme sur le Tour de France. Je prends un Coca et je m’assois. C’est fini.
À l’arrivée, la musique sature dans les haut-parleurs, mais ce n’est pas la grosse fête que j’attendais. Je vois Tsivo et Fredo avec qui je refais la course. On est content de nous.

De retour à Diego-Suarez (en taxi), je m’arrête à l’Hôtel de Ville pour voir si l’arrivée du marathon est plus animée. Un officiel engueule méchamment un coureur qui a fait une partie de la course assis sur le cadre de bicyclette de son ami. Ce n’est pas mieux qu’à Ramena.
L’animateur hurle dans le micro qu’il faut être au Grand Hôtel à 16h pour la remise des prix.

16h, environ 50 coureurs attendent sur la rue Colbert. Ils portent tous leur médaille et t-shirt de « Finisher ».
La porte de la salle de conférence s’ouvre à 16h10 et on nous invite à entrer. Remise de prix sans fioriture, le ton est solennel. Un représentant de la fédération malgache d’athlétisme est là pour annoncer que le Marathon de Diego-Suarez sera homologué à partir de l’année prochaine. Bonne nouvelle pour les organisateurs qui espèrent que ça augmentera le nombre de participants.
Petite touche perso de l’organisateur principal qui remet un trophée symbolique à Jean, un vétéran qui a participé aux 4 éditions du semi-marathon de Diego-Suarez. Bon dernier de la course du jour. Jean est connu. Ovation de l’assistance, mais vive réaction de Rama qui affirme être le premier vétéran. Le représentant de la fédé explique qu’il n’y a pas de classement par catégorie pour le semi, « Jean a reçu un trophée symbolique ». Rien à faire. Rama insiste, épaulé par Robert, le « vrai deuxième vétéran » des 22,5km. Délire dans la salle. Enfin de l’ambiance, même si c’est moins réjouissant que ce que j’attendais. Rama et Robert ont finalement un petit cadeau après les excuses de l’organisateur.

Photo des gagnants à la remise des prix au Grand Hôtel : Rama et Robert au centre

Après l’effort, le réconfort. Un punch à la main, je discute avec des marathoniens. Je me rends compte que c’est un temps correct pour un premier semi.
Je suis convaincu. Même si Phidippidès est mort d’épuisement après avoir délivré son message à Athènes, l’année prochaine mon objectif sera de traverser la ligne d’arrivée sur la Place de l’Hôtel de Ville.


[1] Le vent du Nord de Madagascar.
[2]
« Allons-y ! » en malgache.


À la découverte de l’inouï

Hannes & Ben

On prend souvent Ben et Hannes pour des frères. Ils sont tous les 2 Allemands, mais physiquement, ils n’ont en commun qu’une énorme barbe qui masque pourtant la moitié de leur visage. Avec la casquette de marin, ils ont l’allure stéréotypée du vieux capitaine de bateau représenté dans les fictions. Après 18 mois à naviguer, on prend forcément le look du Capitaine Nemo.
Sous la casquette, on découvre une coupe de cheveux electro-punk. Parce qu’en fait, ils sont musiciens avant d’être marins (pour rester dans les stéréotypes).

Profitant d’une escale à Madagascar, Ben et Hannes ont participé à la Grande Régate de Nosy Be dont ils avaient eu vent en discutant avec un des 3 seuls germanophones de l’île. « C’est la première fois qu’on participe à une course, précisait Hannes. C’est pour s’amuser. Le reste du temps on navigue pour faire de la musique ».
Ben et Hannes sont en « expédition musicale » depuis un an et demi. À bord de leur voilier, ils vont s’arrêter dans une quarantaine de pays pour réaliser le projet Sailing Conductors. « On arrive dans un pays et on enregistre un groupe. À la prochaine escale, on va rencontrer un autre groupe qui écoute le précédent enregistrement et qui jouera par-dessus. À la fin de notre voyage, on va assembler le tout pour en faire une œuvre conçue par des musiciens – éparpillés aux quatre coins du globe – qui jouent ensemble sans s’être jamais rencontrés ».

L’aventure commence lorsque Ben projette de rentrer à Berlin par la mer, en passant par le Canal de Suez à la fin de ses études d’ingénieur du son en Australie. Hannes qui a suivi la même formation en Allemagne le rejoint et ils cherchent un bateau d’occasion pour leur périple. À cause des attaques des pirates au large de la Somalie, ils préfèrent rejoindre l’Atlantique en passant par le Cap de Bonne Espérance. Ils décident alors de profiter de ce voyage pour créer une expérience artistique.
Ce qui devait être une simple traversée devient alors un parcours musical ambitieux, s’inspirant de Music For Change et Lux Aurumque. Alors que ces deux projets sont faits de reprises, Sailing Conductors se démarque en enregistrant des musiciens qui jouent des improvisations et leurs compositions originales.

C’est dans les îles Salomon qu’ils ont finalement trouvé leur bateau : Marianne. « C’était une occasion sur Internet. On a décidé d’acheter le bateau sans le voir parce que c’était le moins cher ».
Avec sa grande voile rouge et son nom écrit à l’arrache, ce monocoque de 9m90 est à l’image de ses occupants : une allure classique avec un côté rock n’ roll.

Marianne pendant la Grande Régate de Nosy Be

À Nosy Be, Ben et Hannes sont allés à la rencontre de 4 musiciens du bar Le Taxi-Be. Patrick, le bassiste et les trois choristes ont contribué à l’élaboration de Sailing Conductors. Ils ont aussi joué avec des musiciens rencontrés sur la plage. Notamment Livingstone (qui fera l’objet d’un prochain billet) et Solo Vahia, les deux animateurs emblématiques d’Ambatoloaka.

Enregistrement de Solo Vahia à Nosy Be

Avant de s’arrêter dans l’île aux parfums, Capitaine Ben et son matelot Hannes ont navigué environ 5 000 km depuis le Sri Lanka. Ils s’étaient déjà arrêtés en Australie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Indonésie, Thaïlande, Vietnam, Malaisie, Inde.

Ben et Hannes financent leur projet grâce au soutien de différents partenaires et par la publication de leurs récits de voyage dans un journal local d’Allemagne.

Partie de Nosy Be le jeudi 20 septembre, Marianne se dirige en ce moment vers le Mozambique. Ben et Hannes y rencontreront Lysiane de l’Institut français de Maputo qui les guidera vers des artistes de la capitale mozambicaine.

Rendez-vous dans 6 mois pour découvrir le résultat final de cette expédition musicale. En attendant, voici une vidéo tournée à Nosy Be.